janvier 2017
La conception en urbanisme
Éclairer les mécanismes de conception par les simultanéités
Les imbrications entre planification et projets
Éclairer les mécanismes de conception par les simultanéités : les imbrications entre planification et projets,
Riurba no
3, janvier 2017.
URL : https://www.riurba.review/article/03-conception/mecanismes/
Article publié le 1er janv. 2017
- Abstract
- Résumé
Enlighten design processes by simultaneities: the interweaving between planning and urban projects
Urban planning practices develop a double coherence: linearity of procedures and simultaneity of processes. This article analyses the forms of management of planning exercises, showing how the simultaneities structure the forms of design processes. Identified as such, these simultaneities could give a reinforced efficiency to the planning process. Thus, the making of plan appear widely open to environment and anticipate the phase of operational implementation of the projects.
Les pratiques d’élaboration en urbanisme se caractérisent par la conjonction d’une double cohérence : la cohérence procédurale marquée par la linéarité et la cohérence des processus effectifs caractérisée par la simultanéité. Cet article analyse les modalités de pilotage des exercices de planification pour montrer que les simultanéités en structurent la conception. Ces dernières assurent une efficience renforcée du processus de planification. Ainsi, l’élaboration du plan apparaît largement ouverte à l’environnement extérieur et anticipe la phase de mise en œuvre opérationnelle des projets.
post->ID de l’article : 4479 • Résumé en_US : 4700 • Résumé fr_FR : 4697 •
Introduction
La recherche de cohérence est un principe structurant implicite de la planification et de l’urbanisme (Gaudin, 1993[1]Gaudin JP. (1993). Les nouvelles politiques urbaines, Que-sais-je ?, n° 2839, Vendôme, PUF, 127 p. ; Van Neste, Gariépy, Gauthier, 2012[2]Van Neste S, Gariepy M, Gauthier M. (2012). La cohérence dans l’urbanisme montréalais : entre planification et mise en débat, Géocarrefour, vol. 87(2), p. 87-99.). Si, avec la loi SRU, ce principe est devenu une référence explicite, une injonction récurrente, ses modalités restent floues. Selon Paulhiac (2008[3]Paulhiac F. (2008). Le débat public, facteur de cohérence de l’action collective urbaine ? L’exemple des Plans de déplacements urbains en France. Dans Gauthier M, Gariepy M, Trépanier MO (dir.), Renouveler l’aménagement et l’urbanisme. Planification territoriale, débat public et développement durable, Les Presses de l’Université de Montréal, p. 139-162.), d’une part, la loi dit peu sur les méthodes qui doivent être inventées sur le plan local pour respecter et rendre effective la cohérence, d’autre part, « l’évidence » de la mise en cohérence masque généralement les contenus et les modalités possibles de sa mise en pratique. Plus particulièrement, la conception en urbanisme apparaît prise en tension entre deux formes de cohérence : celle des procédures mises en place sous l’impulsion législative et normative de l’État et celle des processus effectifs, réalisés et gérés localement. Si la première reste encore marquée par la linéarité, la seconde s’appuie sur des simultanéités : entre scènes d’action, entre fins et moyens, entre cadre règlementaire et dessin du projet. Cette cohérence de la simultanéité est peu explicitée ; elle peut être néanmoins saisie par l’observation des pratiques concrètes.
Cet article s’appuie sur l’analyse du travail des chefs de projet en situation de pilotage des exercices de planification. L’élaboration des plans y est appréhendée comme un exercice de conception. Il s’agit de saisir le cheminement qui mène à la réalisation du document final, les matériaux mobilisés et les mécanismes d’agencement de ces matériaux. En ce sens, cet article participe à élargir l’usage des termes « concepteur » et « conception », longtemps réservés à l’activité de l’architecte, du paysagiste, ou à la définition des formes urbaines, au champ urbain (Arab, 2014[4]Arab N. (2014). L’urbanisme et l’innovation. Dossier pour l’habilitation à diriger des recherches de l’université Paris-Est, 8 décembre, 189 p.).
Nous commençons par exposer la façon dont coexistent la cohérence procédurale (linéaire) et la cohérence processuelle (faite de simultanéités). Pour cela, nous suivons les chemins empruntés par les chefs de projet lors de l’élaboration du plan. Puis nous explorons plus avant les différentes formes de simultanéités observées et les types de cohérence associés. Ces simultanéités illustrent une élaboration des plans largement ouverte aux autres scènes d’action locales, qui tente de s’adapter à l’existant, qui procède par assemblage de projets, et qui anticipe les contraintes de la mise en œuvre. La dernière partie aborde plus spécifiquement la simultanéité des fins et des moyens, qui traduit une recherche de cohérence de l’opérationnalité, c’est-à-dire une quête d’information et d’articulation des actions concomitamment à l’œuvre sur un territoire, doublée d’une préoccupation de la faisabilité du plan par les différents services engagés dans la mise en œuvre. La conclusion met en avant les enjeux de la saisie de ces simultanéités de l’action, aussi bien pour la recherche que pour l’enseignement en urbanisme.
Le paradoxe de la conjonction d’une double cohérence
Linéarité procédurale et simultanéité processuelle
Alors que la pratique se caractérise par une conception itérative, où les étapes de diagnostic et de définition des propositions se fondent l’une dans l’autre, où les délais comprimés ne permettent pas toujours de finaliser les étapes entamées, c’est la cohérence linéaire des procédures qui est généralement mobilisée pour communiquer sur l’action. En effet, dans une majorité de cas, les représentations schématiques, affichées par les collectivités locales et territoriales pour illustrer les démarches censées avoir été suivies, dessinent un modèle de conception linéaire, par phases successives : diagnostic, objectifs et définition d’actions[5]Un premier panorama rapide de ces représentations a été effectué par une recherche sur Internet en utilisant les mots-clés : « démarche d’élaboration PDU » et « démarche d’élaboration SCOT ». Pour chaque cas, les 15 à 20 premiers liens proposés par le moteur de recherche ont été regardés. Dans la quasi-majorité des cas, des processus linéaires apparaissent. Quelques exceptions ont néanmoins été repérées, notamment les représentations de l’élaboration du PDU de l’agglomération grenobloise et du SCOT de la région urbaine grenobloise, qui montrent les chevauchements entre diagnostic et définition des scénarios dans le cas du PDU, et entre diagnostic et stratégie générale dans le cas du SCOT.. En premier lieu, ces représentations répondent aux modèles d’élaboration préconisés par les textes législatifs et les guides et fiches méthodologiques édités par le réseau technique de l’État (ADEME, CEREMA). En second lieu, ces représentations affichées envoient les signaux d’une démarche qui se veut rationnelle. Les phases de conception, de décision et de mise en œuvre sont distinguées et clairement séparées. Elles sont destinées à trois catégories de public bien distinctes : les services de l’État, les élus et fonctionnaires territoriaux, et enfin les administrés (figure 1).
À destination de ces trois publics, ces schémas adressent un message générique : la cohérence organisationnelle ou procédurale (respect des étapes et de leur continuité, construction d’un diagnostic partagé, cohérence des objectifs et des mesures…) est la garantie du bon niveau de cohérence du plan ou du projet. Ainsi, comme le souligne Paulhiac (2008[6]Op. cit.), la continuité procédurale entre objectifs, moyens et mise en œuvre incarne encore aujourd’hui la « cohérence interne » d’un plan ou d’un projet.
La cohérence procédurale est également marquée par une « cohérence externe » du plan avec d’autres plans ou réflexions à l’œuvre sur le territoire. Cette cohérence externe renvoie tant à une logique de compatibilité entre documents, qui doit être respectée (entre les plans qui fixent les orientations générales, les plans spatiaux sectoriels, subordonnés aux premiers, et, en bout de chaîne, le plan de réglementation des sols), qu’à une nécessité de transversalité entre différentes réflexions sectorielles. Cette cohérence externe « interroge plus simplement la transversalité et la mise en résonnance des réflexions stratégiques menées à différentes échelles territoriales, mais aussi l’articulation des actions menées dans différents secteurs d’intervention propres à la gestion urbaine » (Paulhiac, 2008).
Parallèlement à cette cohérence procédurale, l’élaboration des plans relève d’une cohérence processuelle propre à l’activité de conception. Cette cohérence de la conception est notamment abordée par la littérature scientifique portant sur le renouveau de la planification. Basée sur l’observation de nombreuses expérimentations durant les décennies 1990 et 2000, cette littérature met en évidence que les démarches analysées dans différents contextes ne sont ni identiques, ni totalement prédéfinies par les agents de l’État (contrairement à l’ancien modèle de la planification dite traditionnelle). Pour les acteurs responsables de l’élaboration du plan, la dynamique du processus d’élaboration devient un enjeu, et il s’agit de réfléchir aux modalités à mettre en place. Ce qui est en jeu dans cette construction, c’est la coordination des acteurs et des étapes, autant que la coordination des actions (Motte, 2005[7]Motte A. (2005). La notion de planification stratégique spatialisée (Strategic Spatial Planning) en Europe (1995-2005), Paris La Défense, ministère de l’Équipement (PUCA, coll. Recherche n° 159), 90 p.). Or cette coordination semble s’appréhender hors de toute logique de linéarité, de continuité et de hiérarchie.
Voici quelques caractéristiques de ces processus. Les anciennes chronologies qui enchaînaient le diagnostic, l’identification des besoins, l’élaboration de scénarios, la programmation, le projet… sont bouleversées et remplacées par des démarches itératives et incrémentales qui intègrent les feed-back (Ascher, 2001[8]Ascher F. (2001). Les nouveaux principes de l’urbanisme, La Tour d’Aigues, Éditions de l’Aube, 109 p.). La planification se veut plus pragmatique, plus ouverte et plus négociée, et dès lors les relations entre « projets opérationnels » et « stratégies » deviennent plus itératives : elles ne relèvent plus d’échelles séparées ou de documents distincts. La question de l’action opérationnelle intègre la définition des stratégies. L’étude des démarches de planification stratégique spatialisée ou les expériences italiennes de planification d’aire vaste tendent à montrer que « Les documents sont en même temps stratégiques et opérationnels » (Novarina, 2003[9]Novarina G (dir.). (2003). Plan et projet. L’urbanisme en France et en Italie, Paris, Anthropos-Economica, collection Villes, 233 p.). Selon Zepf et Andres (2011[10]Zepf M, Andres L. (dir.). (2011). Enjeux de la planification territoriale en Europe, Lausanne, Presses Polytechniques et Universitaires Romandes, 309 p., p. 19.), l’évolution des pratiques pose en des termes nouveaux le rapport entre objectifs et moyens : « Le passage du planning à la planification stratégique traduit une transformation des façons de concevoir l’action publique (…). Il conduit à relativiser l’importance de la phase de fixation des objectifs, considérée jusque-là comme le moment privilégié d’expression de la volonté du politique, par rapport aux phases de mise en œuvre ou de contrôle, jugées jusque-là relevant de l’instrumentation technique ». Des travaux récents confirment également le caractère itératif des phases de définition des objectifs politiques et des phases de réalisation opérationnelle dans le cas du pilotage de grands projets d’aménagement urbain. Joël Idt montre que l’unité de ces projets, venant reconfigurer des pans entiers de quartiers urbains, ne relève pas de l’existence préalable d’orientations politiques d’ensemble qui feraient converger dans une même direction les acteurs et les composants épars nécessaires à leur concrétisation. À l’inverse, l’unité relève de la construction de relations extra-hiérarchiques entre acteurs techniques et politiques établies tout au long du processus, et rendues nécessaires par l’ajustement des phases de réalisation opérationnelle des multiples sous-projets qui composent le projet d’aménagement. Ainsi, l’auteur met en évidence que les significations politiques et les enjeux de l’action collective ne précèdent pas la phase de réalisation opérationnelle des projets d’aménagement urbain mais en sont partiellement le produit (Idt, 2012[11]Idt J. (2012). Le temps de la réalisation des projets urbains : une fabrique a posteriori des enjeux politiques de l’action collective, Géocarrefour, vol. 87(2), p. 75-85.).
S’il existe un hiatus assez fort entre la cohérence procédurale et la cohérence processuelle, ces dernières semblent coexister dans l’action. Comment ce hiatus est-il vécu et géré par les acteurs qui sont au cœur du pilotage des démarches d’élaboration ?
Le chef de projet et ses chemins de la cohérence
Plus particulièrement, nous nous intéressons aux chefs de projet en situation de pilotage d’une procédure de planification. Pourquoi mettre la focale sur cet acteur, qui n’est pas le seul à intervenir et à peser sur la dynamique et les dispositifs du processus d’élaboration ? Le technicien-chef de projet semble être particulièrement au centre de la tension qui s’opère entre le cadre réglementaire et normatif de la mise en œuvre des procédures, qui fait peser sur ses épaules un « impératif de cohérence », et les enjeux et situations locales, qui influent sur l’organisation des dispositifs et les ambitions du processus d’élaboration. De plus, il est amené à tenir plusieurs positions dans l’action : tantôt il surplombe le processus en participant à en définir les règles et le déroulement, tantôt il est au cœur du processus en produisant des données et en animant des réunions, tantôt il est à l’interface des différentes instances (comité de pilotage, comité technique, groupes de travail) et sphères d’acteurs. Enfin, dans la mesure où les modalités pratiques de la cohérence sont floues et peu définies, il est en situation de devoir inventer une part des dispositifs d’élaboration.
L’hypothèse est faite que le chef de projet tente de faire tenir ensemble cohérence procédurale et cohérence processuelle. Il développe pour cela ses propres « chemins de la cohérence ». Rendre intelligibles ces mécanismes d’articulation est un enjeu permettant d’approfondir les connaissances relatives aux démarches de conception et aux compétences qu’elles exigent. Pour cela, cet article s’appuie sur une posture compréhensive des pratiques en référence à la sociologie compréhensive de Max Weber, et à une « théorie de la pratique » développée aux États-Unis dans les années 1980, avec les travaux de Donald A. Schön[12]Schön D. (1987). Educating the Reflective Practitioner. Toward a New Design for Teaching and Learning in the Professions, San Francisco, Jossey-Bass Inc. Publishers, 369 p. sur « l’agir professionnel » et de John Forester. Deux principaux terrains de recherche sont mobilisés. Celui du suivi de l’élaboration du PDU de Marseille, qui a permis de rentrer dans la « boîte noire » du processus d’élaboration, c’est-à-dire de suivre de l’intérieur l’élaboration en temps réel : en participant aux réunions de travail en tant qu’observateur, en recueillant des documents de travail propres au chef de projet (calendriers prévisionnels successifs, schémas d’organisation des étapes et des instances d’élaboration…), en suivant sur le temps long (plusieurs années) le chef de projet, avec des entretiens réguliers sur l’évolution de la démarche, en l’amenant à réfléchir sur sa pratique. C’est une démarche lourde à mener qui nécessite l’appui des principaux acteurs techniques et politiques engagés dans la procédure. Le second terrain, celui de Vitrolles, a permis de côtoyer pendant cinq années des chefs de projet de différentes actions (Agenda 21, Projet de Rénovation Urbaine), dans le cadre d’un partenariat entre la Ville et l’Institut d’Urbanisme d’Aménagement Régional d’Aix-Marseille Université, relatif à des ateliers de projet destinés aux étudiants de Master. Des échanges très réguliers avec les élus et les techniciens, et le recueil de nombreux documents techniques ont apporté une bonne connaissance des projets et procédures en cours sur la commune. Enfin, des entretiens longs, semi-directifs, avec les responsables des projets et procédures ont permis d’échanger sur leur parcours, leur culture professionnelle, les méthodes et les compétences mobilisées pendant le pilotage de telle ou telle démarche.
Les analyses du processus d’élaboration du PDU de Marseille et les entretiens auprès du chef de projet de l’Agenda 21 de Vitrolles montrent des phénomènes communs. Dans les deux cas, les chefs de projet souhaitent initialement suivre la démarche préconisée par le cadre national (guide méthodologique du CERTU pour le PDU, cadre national des démarches de développement durable pour l’Agenda 21), mais des « contraintes » liées aux situations locales vont conduire à comprimer les étapes et à en mener certaines de front. Les chefs de projet vont alors développer des solutions permettant de préserver ce qui, à leurs yeux, reste l’essentiel de la démarche. Enfin, dans les deux cas, si les chefs de projet se réfèrent au cadre national, ils expriment également une distance vis-à-vis d’une séparation artificielle entre l’étape de définition des objectifs et l’étape de définition des actions.
L’élaboration du premier PDU de Marseille s’est déroulée sur trois années, entre 1997 et 2000. Pour le chef de projet, ingénieur en chef à la direction des transports et déplacements de la Ville, c’est une situation nouvelle ; selon ses dires, le guide méthodologique du CERTU s’est révélé être un « instrument indispensable ». L’observation de terrain montre que le calendrier de la démarche n’a cessé de se comprimer, conduisant le chef de projet à regrouper des étapes, et à reconfigurer les modalités de la concertation. Fin 1998, le PDU doit désormais s’élaborer sous le registre de l’urgence, car le document est perçu comme un appui aux demandes de subventions qui se négocient dans le cadre du futur Contrat de Plan État-Région (Yerpez, Hernandez, 2000[13]Yerpez J, Hernandez F. (2000). Les contraintes temporelles dans le processus d’élaboration des PDU, le cas de Marseille, Recherche Transport Sécurité, n° 69, p. 8-21.). La juxtaposition des différents calendriers prévisionnels révèle la distorsion progressive du déroulement souhaité lors du lancement de la procédure en novembre 1997 : le nombre de réunions des comités (de pilotage et techniques) a été divisé de moitié, certaines étapes ont disparu ou ont été déplacées. L’étape de « formalisation des objectifs » a été remplacée par la rédaction, en interne, d’un « rapport d’orientation sur les objectifs ». Cette décision a été justifiée par le fait que des réflexions concernant les déplacements étaient menées dans d’autres scènes d’action parallèles : « L’étape de formulation des objectifs va être “shuntée”, il y a des raisons à ça. Le mieux, c’est de récupérer les objectifs établis dans le cadre de la Directive Territoriale d’Aménagement. La deuxième raison, un certain nombre de colloques et de réunions ont eu lieu en novembre et décembre sur L’Aire Métropolitaine Marseillaise (AMM). On s’est aperçu qu’il y avait un consensus au niveau de l’AMM sur des grands objectifs […]. Le Dossier de Voirie d’Agglomération, le Plan Régional pour la Qualité de l’Air, établi au niveau du projet de loi LAURE, le Porter à connaissance de l’État sont des documents cohérents entre eux, on est d’accord sur les objectifs qu’ils nous imposent[14]Le chef de projet du PDU de Marseille, le 22 décembre 1998. ».
Les phases de concertation, initialement prévues lors de la formalisation des objectifs, puis entre l’élaboration des scénarios et l’élaboration du projet de PDU, ont été supprimées. Face à ces multiples changements de rythme et d’esprit, le chef de projet a dû faire preuve d’inventivité pour maintenir la volonté d’une concertation continue : pour pallier la disparition des étapes formelles de concertation, il a réévalué la composition, le rôle et les thèmes des groupes de travail. Mobilisés pour l’élaboration des scénarios et du projet de PDU, ces groupes ont accueilli des représentants de la confédération des Comités d’Intérêt de Quartier (CIQ) et de quelques associations. Ainsi, ces acteurs ont pu interagir de façon répétée et régulière avec les bureaux d’études et les ingénieurs des services techniques en participant à la conception même des scénarios et du projet. De plus, considérés comme une « émanation du comité technique », ces groupes de travail se sont retrouvés au cœur du dispositif d’élaboration du PDU. Nous y reviendrons dans la troisième partie.
L’élaboration concrète de l’Agenda 21 de la Ville de Vitrolles ne correspond pas totalement au récit linéaire présenté sur le site Internet de la commune (figure 2). Une série d’entretiens avec le chef de projet révèle un processus plus découpé et plus complexe. Lancée en septembre 2009, l’élaboration a connu un temps d’arrêt important entre 2010 et 2011, au stade de l’étape du « diagnostic partagé » (la période est marquée par le départ de l’élu adjoint au développement durable, porteur de la démarche). De 2009 à 2010, le diagnostic partagé a été essentiellement alimenté par une concertation, visant à faire s’exprimer les participants sur leur vision du territoire, et qui a très vite débouché sur des propositions et des attentes à court terme. Aussi, contrairement à ce que peut laisser penser la chronologie affichée, à la fin 2010, aucun diagnostic n’est formalisé. En 2011, la démarche est reprise politiquement par le maire. Un chargé de mission développement durable, nouvellement recruté, en devient le chef de projet. Une de ses premières actions est d’engager la rédaction d’un rapport de diagnostic. C’est alors le diagnostic du PLU (dont l’élaboration mobilise un bureau d’études privé) qui va servir à l’écriture du diagnostic de l’Agenda 21. « On a pris le diagnostic du PLU et on l’a totalement situé dans le diagnostic de l’Agenda 21, pour n’en faire qu’un seul. On s’est appuyé sur les temps de concertation obligatoires mis en place pour le PLU […] On s’est échangé les différents diagnostics : on a récupéré le diagnostic réalisé par Citadia pour alimenter notre propre diagnostic, et Citadia a repris des éléments du nôtre[15]Entretien avec le chef de projet de l’Agenda 21, Vitrolles, le 15 juillet 2014. ».
Ce diagnostic a été finalisé alors que l’étape de « définition de la stratégie de développement durable » était déjà entamée. De plus, entre 2011 et 2012, les deux étapes « stratégie de développement durable » et « élaboration du plan d’actions » ont eu du mal à ne pas s’entrecroiser. D’une part, en raison de la difficulté à cloisonner intellectuellement définition des objectifs et définition des propositions d’actions. D’autre part, car les délais induits par le lourd dispositif d’ateliers (réunissant d’abord 25 élus, puis ces élus et 120 cadres et techniciens) mis en place pour les phases « stratégie » et « plan d’actions » ont été perçus comme beaucoup trop longs par les services. Ces derniers n’ont pas attendu la fin des ateliers pour engager opérationnellement les actions pressenties. Aussi, certaines actions ont intégré l’Agenda 21 alors qu’elles étaient déjà lancées. « L’étape de formalisation des stratégies, ça a été le processus le plus dur. C’est là où je suis le plus sceptique concernant le cadre national. On est resté six mois à travailler là-dessus avec des concepts, des stratégies, des choses dont le commun des mortels n’a pas l’habitude […] j’ai passé beaucoup de temps sur la méthodologie, au détriment de l’aspect opérationnel, ce qui a suscité beaucoup de frustration dans les services qui étaient prêts à faire des choses[16]Idem. ».
Enfin, l’élaboration de l’Agenda 21 a été nourrie par plusieurs démarches menées de façon concomitante : le PLU, le programme « Agir » de la Région PACA et les réflexions du projet « Vitrolles Échangeur » (projet lié à la participation de la commune à l’événement « Marseille Provence 2013 Capitale Européenne de la Culture »). Et inversement : « L’équipe du projet Vitrolles Échangeur est allée sur la participation, sur l’urbanisme… Elle ne s’est pas limitée à la culture. La personne qui menait Vitrolles Échangeur s’est appuyée sur la concertation de l’Agenda 21. Les actions Vitrolles Échangeur sont les actions Agenda 21. Les objectifs stratégiques ont été définis ensemble[17]Idem. ».
Ces premiers éléments empiriques montrent combien l’élaboration effective, qui se déroule dans un contexte local situé et dans le cadre d’une action collective, place le processus de conception dans une logique de simultanéité avec d’autres réflexions ou actions en cours. Cette simultanéité, qui semble caractériser la cohérence processuelle, entre en tension avec la cohérence linéaire de la procédure. Le terme simultanéité est ici entendu dans une acception dilatée de l’instant : il qualifie des évènements qui se déroulent dans une même fenêtre temporelle, qui ne sont pas séquencés par étapes distinctes et ordonnées, mais à l’inverse, se superposent. Dès lors, les éléments qui, dans un modèle linéaire-normatif, sont censés arriver après (c’est-à-dire à l’issue de chaque étape), sont déjà là.
Saisir les simultanéités de la cohérence des processus
Des scènes d’élaboration confrontées au « déjà là »
La planification « ordinaire » que nous avons pu observer s’élabore dans des scènes locales déjà encombrées d’objectifs et de projets, et faisant concomitamment l’objet de multiples scènes d’action vouées à l’élaboration de tel ou tel schéma, contrat, document de planification. Ce « déjà là » semble particulièrement structurant dans la conduite des démarches. Il interroge tant l’articulation entre objectifs et moyens, que la hiérarchie des documents et les modalités de leur mise en compatibilité.
Pour le chercheur en situation d’observation, l’élaboration locale des documents stratégiques et réglementaires peut s’envisager comme un « moment » particulier, qui vient se superposer à une gestion urbaine courante. C’est généralement en référence au calendrier des procédures que s’établissent les bornes temporelles de ce « moment » (i.e en tension entre calendrier national et calendrier local) et, partant, qu’entrent en scène les acteurs : l’élu responsable, les fonctionnaires territoriaux engagés dans l’élaboration, les partenaires de la démarche. Ce moment peut être qualifié « d’événement », en ce qu’il représente une rupture possible dans le cours du temps : « L’événement ouvre sur une situation nouvelle, palette inédite de possibilités jusque-là restées latentes ou impensées. Le temps est précisément cet écart entre ce qui est déjà là et ce qui n’est pas encore, tel qu’il va être rempli et construit par l’action » (Bensa, 1997[18]Bensa A. (1997). Images et usages du temps, Terrain, n° 29 [En ligne). Cet « évènement » n’est pas étanche, ni aux multiples petites décisions de la gestion courante, ni aux débats qui accompagnent l’élaboration de tel ou tel projet d’aménagement d’envergure, ni aux autres documents-cadres en cours d’élaboration. Bref, il apparaît comme un système ouvert, dont les enjeux dépassent la simple mise en compatibilité entre documents.
Les élaborations du PDU de Marseille et du SCOT de l’agglomération d’Orléans illustrent la façon dont le « déjà là » interroge les marges de manœuvre des chefs de projet face aux nombreuses décisions prises ou en train d’être prises sur le territoire. Pour ces derniers, il s’agit de savoir quelles sont les actions déjà là, susceptibles d’interférer ou, à l’inverse, d’aller dans le sens de la philosophie du plan.
À la fin des années 1990, l’élaboration du PDU de Marseille intervient alors que se prépare une DTA (Directive Territoriale d’Aménagement) et que commencent les négociations sur les équipements à financer dans le cadre du Contrat de Plan État-Région. Ces deux scènes mobilisent une part importante des acteurs de la région urbaine, parmi eux certains sont également engagés dans l’élaboration du PDU. La Ville de Marseille est parallèlement mobilisée sur les projets qui concernent son territoire : un schéma de transport collectif en site propre vient d’être voté en conseil municipal, un document prospectif, le « Schéma de cohérence Marseille 2015 », est adopté par le conseil municipal en novembre 1997. Ce dernier document exprime un « projet pour Marseille », qui se veut « cohérent » (en articulant différentes thématiques), « stratégique à 20 ans » (2015) et programmatique. La question du centre-ville y occupe une place conséquente : réhabilitation de logements, création de deux lignes de tramway et piétonisation de l’hypercentre commerçant figurent parmi les actions à engager. Ces deux dernières actions seront débattues dans le cadre du PDU. Entre le « schéma de cohérence Marseille 2015 », la DTA et les négociations du CPER, quelle place pour le PDU dans la définition d’une stratégie d’action ? Durant l’élaboration, les responsables du PDU font souvent allusion à ces différentes scènes et à d’autres : le projet de tronçon nord de la rocade L2 (dont les variantes font alors l’objet d’une concertation), le projet urbain Euroméditerrannée (qui intègre la requalification des pénétrantes autoroutières et de nouveaux parkings). Bref, au moment où s’élabore le PDU, de nombreux choix en matière d’organisation des déplacements semblent avoir été pris.
Au début des années 2000, alors que le SCOT de l’agglomération d’Orléans est en cours d’élaboration, certaines communes n’ont pas attendu son approbation pour élaborer leur PLU. Par exemple, la commune de Chécy a arrêté le PADD de son PLU quatre mois avant l’arrêt du PADD du SCOT ; le PLU de cette commune est approuvé plus d’un an avant l’approbation du SCOT. Ainsi, la mise en place du SCOT se superpose à du « déjà là » : des POS révisés quelques années auparavant, des PLU fraîchement approuvés, et surtout, nombre d’opérations d’habitat déjà lancées. « Long terme » du SCOT, « moyen terme » du PLU et « court terme » des opérations d’habitat se superposent (Demazière, Hernandez, 2012[19]Demazière C, Hernandez F. (2012). Opérations d’habitat, projets communaux et SCOT : une cohérence variable selon les échelles. Résultats d’enquêtes en Val de Loire, Géocarrefour, vol. 87(2), p.101-113.). Qui plus est, les durées d’élaboration sont variables selon qu’il s’agit d’un SCOT, d’un PLU ou d’une ZAC. À l’échelle des communes, les opérations d’habitat en cours ont été décidées avant l’élaboration du PLU. Ce sont parfois les questions posées par l’arrivée d’une nouvelle opération d’habitat qui ont poussé les communes à engager la révision du POS en PLU. Or l’intervalle de temps entre la décision de réaliser l’opération et son achèvement est long[20]À titre d’exemple : un opérateur prend l’initiative du projet et se manifeste auprès des services de la commune, il établit un plan d’aménagement puis demande les autorisations nécessaires à la réalisation de l’opération. Suite à la phase d’approbation du projet, une enquête publique s’engage et peut donner lieu à de nouvelles modifications du projet. Le processus peut prendre plusieurs années., plus long que l’élaboration du PLU et, de fait, la conception urbaine et architecturale des opérations est toujours à l’œuvre au moment où les services municipaux travaillent à l’élaboration du PLU. Les élus et les techniciens communaux se retrouvent ainsi en situation de tester sur une opération en cours de futurs principes d’aménagement à inscrire dans le PLU[21]C’est particulièrement le cas à Mardié, avec l’opération Clos de l’Aumône, qui est en cours de négociation avec l’opérateur Negocim depuis 2002, ou à Checy avec l’opération de l’Ormeteau..
Ces multiples déjà là peuvent donner l’impression que tout est déjà décidé, alors qu’une nouvelle approche des problèmes et de nouvelles solutions sont appelées, tant par les textes législatifs que par l’évolution des enjeux contemporains de l’aménagement et de l’urbanisme. Néanmoins, l’ouverture de la scène d’élaboration à ce qui est simultané, concomitant, contribue à faire des exercices de planification un processus qui tout à la fois intègre et recompose le déjà là.
La simultanéité, condition de possibilité
d’autres chemins de la cohérence
Nous avons identifié trois formes de simultanéité, ouvrant sur trois types de cohérence.
Simultanéité des scènes d’élaboration. Il est fréquent que les scènes donnant lieu à la production de documents stratégiques ou réglementaires se chevauchent dans le temps. Pour les acteurs engagés dans l’une d’entre-elles, il semble impossible d’ignorer l’existence des autres scènes parallèles (les négociations d’un Contrat de Plan État-Région ou la formalisation d’un Contrat de Ville, la révision d’un Plan Local d’Urbanisme…). Cette simultanéité d’élaboration peut également concerner des scènes, qui selon l’architecture juridique de la loi SRU, seraient plutôt censées se succéder. Or la pratique montre que le SCOT et les PLU s’élaborent souvent en même temps, voire que les PLU précèdent le SCOT (Desjardins, Leroux, 2007[22]Desjardins X, Leroux B. (2007). Les Schémas de cohérence territoriale : des recettes du développement durable au bricolage territorial, Flux, n° 69, p. 6-20. ; Demazière, Hernandez, 2012[23]Op. cit.). C’est la « cohérence externe » de l’action locale qui semble se jouer dans la prise en compte de ces différentes scènes. Cette simultanéité joue un rôle central dans la phase initiale de « définition des objectifs » : elle est un appui à ce que nous nommerons une « cohérence formelle », qui est du registre du discours. Un discours sur une subordination à des documents de rang supérieur, à des décisions prises à plus large échelle. Tout semble comme si ce discours devait être posé « pour la forme », pour qu’ensuite, le processus d’élaboration avançant, les acteurs puissent s’en libérer.
Simultanéité du cadre et du projet. Cette simultanéité traduit des situations où sont testés, sur des opérations en cours, des « principes d’aménagement » qui seront ensuite généralisés dans un document-cadre de planification urbaine (PLU ou SCOT). Cette pratique renvoie à la nécessité d’éprouver un principe d’organisation de l’espace, c’est-à-dire d’en visualiser concrètement les effets. Au cheminement traditionnel (où des principes d’aménagement sont préalablement définis et inscrits dans un document-cadre, puis appliqués à l’occasion de la conception d’un projet circonscrit dans l’espace), un autre cheminement est fréquemment substitué, il consiste à projeter directement des formes urbaines afin de tester et de visualiser des intuitions d’organisation de l’espace. Ensuite, ces principes seront amenés à être généralisés et à figurer dans un document cadre. Dans ce même registre de simultanéité, s’intègrent les démarches qui mobilisent le concours de projets urbains et paysagers ou le workshop afin d’obtenir une vision de l’urbanisation future, qui fera ensuite référence lors de l’élaboration de documents stratégiques ou réglementaires. Ce cheminement peut venir qualifier une planification bottom up, ascendante, qui part d’intentions de projets (d’images de formes urbaines et paysagères), pour ensuite remonter en généralité vers la formalisation d’un cadre pour l’action. Les étapes de concours de projets urbains et paysagers et les étapes de planification règlementaire sont alors conduites en parallèle, et de façon très resserrée. Le concours produit des images globales et structurantes de l’urbanisation future (sans aller sur une idée précise ni du programme, ni des formes exactes), qui guident la révision du plan d’urbanisme. Ce type de démarche, basé sur une itération entre « projet » et « planification », est mobilisé sur certains secteurs à enjeux. En permettant de visualiser les potentialités d’un site, le concours vise tant à nourrir de futurs projets opérationnels (l’aval) qu’à éclairer la maîtrise d’ouvrage dans la définition des documents de planification de l’usage des sols (l’amont). Cette simultanéité est un appui à une « cohérence entre dessein et dessin ». Elle montre la façon dont la préoccupation de la forme urbaine intègre la planification.
Simultanéité des fins et des moyens. Dans le cheminement entre fins et moyens, une question se pose : les moyens peuvent-ils préexister à la définition du problème à traiter ? Avec les cadres d’analyse proposés par Bruno Latour, les outils, la technique, ne peuvent plus être considérés comme de simples moyens, et les fins ne sont plus liées à l’intention et à la maîtrise des seuls humains (Latour, 1999[24]Latour B. (1999). Morale et technique : la fin des moyens, Réseaux, n° 100, p. 39-58.). Pour Latour, en saisissant l’objet technique, l’homme s’insère dans des différentiels de temps et de lieux, il devient un « autre » homme. À travers l’exemple de l’utilisation d’un marteau, Bruno Latour montre combien les techniques entretiennent avec l’être l’humain de tout autres relations que celles de l’ustensilité, de l’efficacité ou de la matérialité : le marteau rend l’homme autre, en faisant courir jusqu’à sa conscience de multiples possibilités d’actions qui ne précédaient pas sa saisie. Les pratiques montrent, notamment dans le champ des transports et des déplacements, l’utilisation d’une boîte à outils susceptible d’orienter les décisions très en amont. Par ailleurs, de façon fréquente, l’observation des processus d’élaboration met en exergue des projets en cours, des « coups partis », bref, des projets déjà là. Ces derniers sont accompagnés d’un discours justifiant leur intégration dans la démarche en cours, les praticiens les qualifient parfois d’« invariants ». Enfin, rapidement, les acteurs en viennent à parler de projets circonscrits et identifiables et de mesures techniques, et ce, très en amont dans le processus d’élaboration. Ainsi, définir les fins pour ensuite identifier les moyens est une rationalité qui ne semble pas correspondre à la réalité des pratiques. Et cela continue de bousculer une représentation ancrée, dans laquelle les actions concrètes sont l’aboutissement d’un processus réflexif et collectif. Pour autant, la simultanéité des fins et des moyens ouvre sur une autre forme de cohérence, qui s’attache à la façon dont les actions concrètes cohabitent entre elles (sont-elles compatibles ou interfèrent-elles ?) et aux effets de leurs associations. Pour appréhender ces effets, les chefs de projet sont amenés à se projeter dans la phase de mise en œuvre. Ainsi, la simultanéité des fins et des moyens est un appui à une cohérence de l’opérationnalité.
La partie suivante illustre de façon empirique cette cohérence de l’opérationnalité.
La cohérence de l’opérationnalité ou l’imbrication entre planification et projets
Les situations de terrain observées font apparaître des mécanismes communs, qui caractérisent le processus d’élaboration du plan. En premier lieu, élaborer le plan, c’est connaître l’environnement des projets en cours, et particulièrement ceux portés par les autres services. Car si, bien souvent, l’élaboration du plan relève de la responsabilité d’un service, sa mise en œuvre implique de nombreux autres services. En second lieu, élaborer le plan, c’est assembler des projets initialement autonomes et faire correspondre des stocks de projets et des stocks d’objectifs. Enfin, élaborer le plan, c’est avoir une stratégie de réalisation opérationnelle, qui se traduit par la présence, dès les phases amont du processus de conception, de réflexions sur les contraintes (techniques et sociales) de la mise en œuvre. Ainsi, sous l’expression « imbrication entre planification et projets », deux résultats sont regroupés. D’une part, l’élaboration du plan procède par assemblage de projets, en d’autres termes les projets concrets ne découlent pas du processus d’élaboration du plan mais semblent le structurer. D’autre part, élaboration du plan et élaboration du projet sont traversées par une même préoccupation de faisabilité opérationnelle.
Connaître les projets,
sélectionner et assembler pour faire le plan
Alors que commence l’élaboration du plan, les scènes locales sont déjà encombrées d’objectifs et de projets. Tout se passe comme s’il y avait un stock d’objectifs et un stock de projets potentiels (ceux déjà là, mais aussi les propositions nouvelles qui émergent au cours du processus). Le travail du chef de projet consiste d’abord à élargir la focale sur un environnement de projets et d’objectifs qui va au-delà de sa scène d’action, puis à tenter de réduire l’autonomie de ces deux stocks. C’est alors un travail de sélection et d’assemblage qui commence : la problématique et l’ambition du plan reconfigurent les attachements entre projets et objectifs. D’une part, la simultanéité entre objectifs et moyens, opposée à la linéarité, apparaît être un facilitateur et un accélérateur de cohérence, d’autre part, la bonne connaissance des projets en cours sur un même territoire est une ressource qui permet de travailler, dans le même temps, la cohérence interne et la cohérence externe du plan.
À Marseille, l’étape d’élaboration des scénarios du PDU se fait ouvertement selon une méthode de travail qui mobilise des projets concrets (appelés « briques »), dont certains figurent dans des documents préalablement établis par la Ville de Marseille, particulièrement le Schéma de Cohérence, Marseille 2015. Le bureau d’études chargé d’assister la Ville dans l’élaboration du PDU et le chef de projet ont procédé à un premier niveau de sélection : une liste de 93 « briques » est distribuée aux membres des groupes de travail (figure 3). Il est intéressant de noter que les projets y figurent de manière « neutre » ; ils sont déconnectés des objectifs qui orientaient les scènes et documents desquels ils sont extraits. Dès lors, les projets sont envisagés comme susceptibles de servir des objectifs ad hoc. Une colonne « brique avant » signale le ou les projets préalablement nécessaires à la réalisation de chaque brique. À ce stade, seule cette indication technique sur le phasage de réalisation relie les projets entre eux[25]Par exemple, pour la brique « Pôle d’échange multimodal de la Blancarde », les briques « Prolongement du Métro Timone-Blancarde » et « Tramway Joliette-St Pierre » doivent être préalablement réalisées.. Une dernière colonne « coût/contraintes » précise les maîtres d’ouvrage ; plusieurs acteurs institutionnels apparaissent : l’État, via la DDE, le Conseil régional, la SNCF, le Conseil général et l’établissement public Euroméditerrannée… Lorsque les projets relèvent de la Ville de Marseille, c’est le service impliqué qui apparaît (Études et Grands Travaux, Circulation, Direction des Transports et Déplacements). Les projets listés relèvent de temporalités hétérogènes, tant en ce qui concerne leur origine (certains sont dans les documents de planification de la ville de longue date – la rocade L2 – d’autres émergent avec le changement de référentiel en matière de déplacement – le réseau deux roues), que leur mise en œuvre (certains ont été actés en conseil municipal, d’autres ont peu de chance d’être réalisés à moyen terme).
La consigne donnée aux groupes de travail est de construire des murs (les scénarios) à partir des briques (les projets) : « On va établir deux ou trois scénarios en empilant ces briques de façons différentes. On n’a pas obligation d’utiliser toutes les briques qui sont là. On devra dire celles dont on ne veut plus par rapport aux objectifs[26]Le directeur adjoint à la direction des Transports, Ville de Marseille, première réunion du GTT « Interactions Déplacements / urbanisation ». ». De plus, les groupes de travail sont conviés à faire des propositions pour compléter la liste distribuée. Selon le chef de projet du PDU, certains projets sont susceptibles de composer une « ossature », alors que d’autres apporteront une « peau ». La métaphore de l’ossature est associée aux projets d’infrastructures (routières et de transports collectifs) et de pôles d’échanges, celle de la peau à des projets d’aménagements urbains, qualifiés de « mesures d’accompagnement ». Cette approche témoigne d’une vision très fonctionnelle des projets : ils ont un rôle à tenir dans un système global. Pour le chef de projet, ce travail de « mécano », d’assemblage des briques-projets en plusieurs scénarios, semble être le « vrai » enjeu du processus d’élaboration. Fins et moyens s’y coconstruisent simultanément. En effet, pour le chef de projet, il n’y a pas prévalence des objectifs sur les projets : « Je voudrais revenir sur l’intervention de madame : “On a du mal à distinguer les objectifs des moyens”. Relativisons l’aspect “objectifs”, parlons-en. Tout est lié, si je veux limiter l’usage de la voiture, moi, technicien, je n’ai pas 36 000 moyens, il faut agir sur le stationnement. L’approche d’objectifs me gêne un peu ; si je ne me pose pas la question des moyens, je me perds. Excusez-moi, je suis dans les moyens, mais quand je raisonne centre/périphérie, je pense tout de suite aux moyens pour se déplacer. Le vélo est un moyen pour se déplacer en périphérie. Voilà le moyen que l’on peut utiliser en périphérie, mais à quel objectif le rattacher ? Là, j’ai un moyen, il faut que je voie ce que je veux en faire[27]Deuxième réunion du GTT « Priorités d’investissement », direction des Transports et des Déplacements, le 5 mai 1999. ».
Si le PDU s’appréhende au début du processus d’élaboration comme un document subordonné au Schéma de cohérence Marseille 2015, au fur et à mesure que se construisent les scénarios, les groupes de travail se mettent en position de recul critique vis-à-vis de ce dernier. La construction des scénarios procède par sélection et construction de liens d’interdépendance entre projets. En argumentant les assemblages de projets, les groupes de travail font émerger leurs propres objectifs pour le PDU (Hernandez, 2003).
À Vitrolles, alors que le processus d’élaboration de l’Agenda 21 entre dans la phase « définition de la stratégie de développement durable », le chef de projet ressent la nécessité de réaliser une carte des projets en cours : « On voulait donner du sens au projet d’Agenda 21, on ne pouvait le faire qu’en s’articulant avec les autres projets. J’ai établi une sorte de cartographie avec les projets transversaux[28]Entretien avec le chef de projet de l’Agenda 21, le 24 juillet 2014.… ». Pour le chef de projet, cette carte permet de définir un état des lieux « de tout ce qui est en cours et qui peut se définir en termes de projet ».
Dans la « carte » réalisée (figure 4), l’acception du terme projet est large : elle recouvre des projets d’équipements, de requalification de voies et d’espaces verts, mais aussi des procédures et des programmes d’action. « Dans les catégories de projets, il y en a qui n’impliquent pas l’opérationnel. Il y a le hard, les constructions, et le soft, plus méthodo, tel le PLU ». À côté des projets opérationnels, figure la date de réalisation prévue. Le chef de projet travaille en mettant cette « carte » en regard d’un autre schéma qui présente les cinq piliers de l’Agenda 21 et leur déclinaison en objectifs[29]Par exemple, pour le pilier 1 « Pour une ville plus conviviale, solidaire, éducatrice », les objectifs déclinés sont : dynamiser et multiplier les espaces communs de rencontre et créer de nouveaux usages (1), mettre en valeur les richesses sociale, culturelle et intergénérationnelle de la Ville et de ses habitants (2), etc.. Concrètement, il s’agit de regarder quels sont parmi les projets en cours, ceux susceptibles d’être des réceptacles d’actions qui seront labellisées Agenda 21 ; et inversement, de regarder de quelle façon intégrer le développement durable dans les projets en cours : « On a commencé à travailler sur le pilier 2 “Pour une mobilité facilitée…” : on regarde la carte des projets de la ville et on pointe l’”Avenue de Marseille”, on va y mettre des pistes cyclables. Il s’agit de vérifier comment les projets qui sont en cours vont permettre d’alimenter la stratégie. Pour que la stratégie ait du sens, elle doit trouver un appui sur ce qui est déjà en cours[30]Entretien avec le chef de projet de l’Agenda 21, le 24 juillet 2014. ». Par ailleurs, pour le chef de projet nouvellement recruté dans le service « Mission de la coordination du Développement Durable », la réalisation de la « carte » est l’occasion de rencontrer les responsables des autres services de la Ville, et de récupérer des informations tant sur l’état d’avancement des projets, que sur les stratégies qui les sous-tendent : « Tous ceux qui étaient porteurs de ces projets participaient aux ateliers de la “Stratégie Agenda 21”. Mais dans les ateliers, à aucun moment, on s’était posé pour faire le point sur les projets, pour faire un état des lieux. Je suis donc allé voir les personnes en parallèle des ateliers. Je me suis dit : il y a bien des stratégies qui sont posées avant, ça va nous servir pour définir la stratégie Agenda 21 ». Pour le chef de projet, la transversalité de la démarche passe également par l’articulation des stratégies : « Il y a quelque chose à quoi j’étais très attentif : la recherche d’une articulation avec d’autres stratégies, le PLU, le programme “Agir pour l’énergie”, le PRU[31]Idem. ».
Pour ce faire, le diagnostic du PLU a été intégré dans l’Agenda 21, et les temps de concertation du PLU ont également permis de présenter l’Agenda 21 aux participants. Les thématiques du programme Agir[32]Appel à projets de la Région PACA, auquel la Ville a répondu et a été lauréate. Ce programme est également piloté par le chef de projet Agenda 21. ont été ventilées dans les piliers de l’Agenda 21. Ces échanges montrent comment se matérialise une recherche de cohérence, tant interne à l’Agenda 21 (entre les piliers, les objectifs associés et leur incarnation par des actions concrètes) qu’externe (entre les objectifs de l’Agenda 21 et ce qui est en cours sur le territoire communal).
Ce mécanisme d’inventaire des projets en cours, qui permet une vue d’ensemble de l’environnement, a également été observé pour la conduite d’un projet d’envergure : le projet de rénovation urbaine de Vitrolles. C’est à l’occasion d’un moment charnière, à la fin du premier PRU et avant le démarrage du second (situé en continuité géographique), que le chef de projet souhaitait inventorier les projets récemment réalisés ou en cours de conception sur Vitrolles. Plus particulièrement, cette cartographie des projets constitue une étape de travail dans la réalisation d’un schéma de cohérence urbaine, nécessaire à l’engagement d’un nouveau contrat ANRU : « J’ai dit au maire : je veux connaître tous les projets qui sont en cours. Tout ce qui est projeté, etc. On a pointé tout jusqu’au grand-centre, plus le voile paysager le long de l’autoroute (…) Il m’a paru important de faire un état des lieux. Le schéma de cohérence urbaine, je voulais qu’il soit fait sur l’ensemble du grand-centre et qu’il ait de l’épaisseur[33]Entretien avec la directrice du PRU, le 27 mai 2015. ». La figure 5 représente le schéma réalisé pendant l’entretien pour illustrer la démarche cartographique opérée : il ne s’agit donc pas de la carte elle-même, mais de son récit dessiné.
Cette prise de connaissance des projets menés par les autres services semble alors servir de prétexte pour interpeler les collègues et prendre des informations sur les possibles interférences (« Il y avait deux projets sur mon avenue… Ils m’avaient déclenché tout en même temps… Heureusement que quelqu’un avait réfléchi à la circulation. L’élu n’a pas fait le réceptacle entre ce qu’on faisait et ce qu’il y avait autour[34]Idem. »), ou pour discuter de la possibilité de faire évoluer conjointement les projets (« je lui ai dit : ton école, on pourrait la travailler différemment… »).
S’assurer de la faisabilité du plan
Si un relatif cloisonnement des services existe dans les collectivités locales et territoriales, il s’accompagne parallèlement d’une préoccupation permanente des agents de prendre de l’information, de croiser les projets, d’articuler. Cette quête d’information et d’articulation est notamment irriguée par la question de la mise en œuvre du plan, qui mobilise généralement un grand nombre de services. Cette préoccupation des chefs de projet interrogés apparaît très en amont dans le processus d’élaboration.
L’élaboration des scénarios du PDU de Marseille et, particulièrement, l’analyse des arguments mobilisés dans l’assemblage des projets en scénarios laissent apparaître plusieurs préoccupations d’ordre opérationnel. En premier lieu, les intitulés des groupes de travail correspondent à des phases d’une démarche de conception et non à des thématiques. Le groupe n°1, « Priorités d’investissement », a pour mission de sélectionner les investissements prioritaires en matière d’infrastructures routières et de transports en commun. Concrète, cette sélection est conditionnée par les ressources financières mobilisables. Le groupe n° 2 (composé de 5 sous-ateliers) s’intitule « Cohérence et mesures d’accompagnement », il vise à établir la cohérence entre l’aménagement de l’espace et les infrastructures projetées. Le groupe n° 3, « Interactions déplacements/urbanisation », vise à proposer des orientations en matière d’urbanisme qui soient cohérentes avec les options définies pour les infrastructures dans le groupe « Priorités d’investissement ». Enfin, le groupe n° 4, « Évaluation des impacts », concerne l’évaluation des différents scénarios. Les membres des groupes ne sont pas « enfermés » dans leur atelier, ils ont été conviés à s’associer à un minimum de trois groupes ou ateliers, ce qui permet une articulation des phases. En second lieu, les débats formulés pendant la construction des scénarios montrent le souci de maîtriser l’ordre de priorité et le calendrier de réalisation des mesures nécessaires à la mise en place des lignes de tramway dans la ville (réorganisation du réseau de bus dans une logique de rabattement, nouveau plan de circulation libérant les artères accueillant les lignes de tram, bouclage des contournements routiers du centre, suppression du stationnement en surface sur certaines voiries, aménagement de l’espace public accueillant le tramway…). Si la mise en œuvre du tramway relève du service Direction des Transports et des Déplacements, qui élabore le PDU, les mesures associées relèvent d’autres services, voire d’autres institutions, et sont susceptibles d’échapper à la DTD. Pour le chef de projet, il est donc important que le PDU débouche sur une programmation précise et validée en conseil municipal (la Ville de Marseille est alors l’AOTU). Les liens d’interdépendance établis entre des projets, dont la mise en œuvre relève de services distincts, renvoient en creux à des coordinations nécessaires entre les services Transports et Déplacements, Circulation, Études et Grands travaux. Ces coordinations peuvent faire écho à des modifications à opérer dans les caractéristiques techniques des projets, à des calages à effectuer en matière de programmation et au phasage de la mise en œuvre. Ces contraintes, liées à la réalisation des projets, sont évoquées, en même temps que l’idée d’intégrer un projet à un scénario est mise au débat. En d’autres termes, le dessein du projet global du PDU et la stratégie de sa réalisation opérationnelle semblent pensés de front. En troisième lieu, il s’agit de s’assurer que d’autres projets, en cours ou prévus dans le cadre de la requalification du centre-ville, ne sont pas contradictoires avec la mise en place du tramway et l’apaisement de la circulation en hypercentre. Ainsi, parmi les relations repérées entre les projets, beaucoup sont des relations qui relèvent du registre de l’interférence et conduisent les groupes de travail à prôner l’abandon de certains projets, quitte à s’opposer parfois aux points de vue du comité de pilotage.
À Vitrolles, la préoccupation de la faisabilité des orientations de l’Agenda 21 a conduit à une imbrication des deux étapes « stratégie de développement durable » et « élaboration du plan d’actions ». Après un premier atelier au cours duquel les élus ont défini les axes, les ateliers suivants ont associé des élus et des techniciens pour définir les objectifs, et ce, afin de s’assurer que les objectifs relèvent bien d’une mission portée par les services : « À chaque fois qu’on définit un objectif, il faut être sûr qu’un service de la Ville sera en lien avec son contenu (…) Il fallait s’assurer que ce sur quoi on allait travailler n’était pas dissocié de ce que les services faisaient habituellement[35]Entretien avec le chef de projet de l’Agenda 21, Vitrolles, le 24 juillet 2014. ». Plus encore, l’objectif formulé doit pouvoir être incarné par une action concrète pour être approuvé au sein des ateliers : « Pour que l’objectif prenne du sens, on essayait de recenser tout de suite des pistes d’action. Plus exactement, ce n’est pas nous qui les proposions, ce sont les participants aux ateliers qui devaient identifier des pistes d’action pour illustrer l’objectif[36]Idem. ».
Enfin, en participant volontairement aux réunions de concertation sur le zonage du PLU, le chef de projet Agenda 21 est animé par la question suivante : « Comment, par le biais du PLU, mettre en place des actions de l’Agenda 21 ? ». Ainsi, par exemple, la concrétisation d’une piste cyclable entre les quartiers sud de la ville et les espaces naturels environnants est anticipée en préemptant le tracé de l’itinéraire cyclable dans le zonage du PLU, et ce, dans le cas où les négociations à l’amiable n’aboutiraient pas.
Conclusion
Les terrains observés illustrent une planification ordinaire, modeste, qui n’en est pas moins maline et riche d’enseignements. Sont mis en évidence des mécanismes qui militent vers un autre cadre interprétatif des exercices de planification, plus proches des attributs généralement associés à la conception de projet : une volonté de composer avec des matériaux déjà là, de faire tenir ensemble des projets épars, le souci de la faisabilité et de l’opérationnalité des objectifs, et une intégration très en amont des contraintes de la mise en œuvre.
Les différentes formes de simultanéités qui caractérisent l’élaboration en matière de planification ne sont pas sans implications tant pour la recherche que pour l’enseignement en urbanisme. En matière de recherche, cela conduit à développer une méthode d’analyse qui procède « à rebours ». C’est-à-dire qui débute par l’analyse des actions concrètes (leur contenu technique et transformations au fil du processus d’élaboration), puis par celle de leurs mises en relations, pour remonter enfin vers la compréhension des objectifs et stratégies spatiales plus globales. En d’autres termes, il s’agit d’analyser la signification d’ensemble du plan au prisme des assemblages de projets opérationnels. En matière d’enseignement, cela milite vers une formation au métier qui ne cloisonne pas la spécialisation des étudiants entre, d’un côté, « la conception d’opération » et, de l’autre, « la planification et la stratégie urbaine ». C’est au contraire l’articulation de ces deux exercices, l’identification de leurs interdépendances, qui permet de faire avancer la fabrique urbaine. Non pas que la conception d’un plan et d’un projet relève des mêmes mécanismes (même si nous avons montré que la question de l’anticipation de la faisabilité opérationnelle irrigue aussi l’élaboration du plan), mais parce que les effets concrets d’un projet dépendent autant de sa nature que des autres mesures et projets auxquels il est associé dans la mise en œuvre. Or cette seconde variable se discute particulièrement dans les scènes d’élaboration des plans, qui apparaissent comme des moments d’assemblage de projets.
[1] Gaudin JP. (1993). Les nouvelles politiques urbaines, Que-sais-je ?, n° 2839, Vendôme, PUF, 127 p.
[2] Van Neste S, Gariepy M, Gauthier M. (2012). La cohérence dans l’urbanisme montréalais : entre planification et mise en débat, Géocarrefour, vol. 87(2), p. 87-99.
[3] Paulhiac F. (2008). Le débat public, facteur de cohérence de l’action collective urbaine ? L’exemple des Plans de déplacements urbains en France. Dans Gauthier M, Gariepy M, Trépanier MO (dir.), Renouveler l’aménagement et l’urbanisme. Planification territoriale, débat public et développement durable, Les Presses de l’Université de Montréal, p. 139-162.
[4] Arab N. (2014). L’urbanisme et l’innovation. Dossier pour l’habilitation à diriger des recherches de l’université Paris-Est, 8 décembre, 189 p.
[5] Un premier panorama rapide de ces représentations a été effectué par une recherche sur Internet en utilisant les mots-clés : « démarche d’élaboration PDU » et « démarche d’élaboration SCOT ». Pour chaque cas, les 15 à 20 premiers liens proposés par le moteur de recherche ont été regardés. Dans la quasi-majorité des cas, des processus linéaires apparaissent. Quelques exceptions ont néanmoins été repérées, notamment les représentations de l’élaboration du PDU de l’agglomération grenobloise et du SCOT de la région urbaine grenobloise, qui montrent les chevauchements entre diagnostic et définition des scénarios dans le cas du PDU, et entre diagnostic et stratégie générale dans le cas du SCOT.
[6] Op. cit.
[7] Motte A. (2005). La notion de planification stratégique spatialisée (Strategic Spatial Planning) en Europe (1995-2005), Paris La Défense, ministère de l’Équipement (PUCA, coll. Recherche n° 159), 90 p.
[8] Ascher F. (2001). Les nouveaux principes de l’urbanisme, La Tour d’Aigues, Éditions de l’Aube, 109 p.
[9] Novarina G (dir.). (2003). Plan et projet. L’urbanisme en France et en Italie, Paris, Anthropos-Economica, collection Villes, 233 p.
[10] Zepf M, Andres L. (dir.). (2011). Enjeux de la planification territoriale en Europe, Lausanne, Presses Polytechniques et Universitaires Romandes, 309 p., p. 19.
[11] Idt J. (2012). Le temps de la réalisation des projets urbains : une fabrique a posteriori des enjeux politiques de l’action collective, Géocarrefour, vol. 87(2), p. 75-85.
[12] Schön D. (1987). Educating the Reflective Practitioner. Toward a New Design for Teaching and Learning in the Professions, San Francisco, Jossey-Bass Inc. Publishers, 369 p.
[13] Yerpez J, Hernandez F. (2000). Les contraintes temporelles dans le processus d’élaboration des PDU, le cas de Marseille, Recherche Transport Sécurité, n° 69, p. 8-21.
[14] Le chef de projet du PDU de Marseille, le 22 décembre 1998.
[15] Entretien avec le chef de projet de l’Agenda 21, Vitrolles, le 15 juillet 2014.
[16] Idem.
[17] Idem.
[18] Bensa A. (1997). Images et usages du temps, Terrain, n° 29 [En ligne].
[19] Demazière C, Hernandez F. (2012). Opérations d’habitat, projets communaux et SCOT : une cohérence variable selon les échelles. Résultats d’enquêtes en Val de Loire, Géocarrefour, vol. 87(2), p.101-113.
[20] À titre d’exemple : un opérateur prend l’initiative du projet et se manifeste auprès des services de la commune, il établit un plan d’aménagement puis demande les autorisations nécessaires à la réalisation de l’opération. Suite à la phase d’approbation du projet, une enquête publique s’engage et peut donner lieu à de nouvelles modifications du projet. Le processus peut prendre plusieurs années.
[21] C’est particulièrement le cas à Mardié, avec l’opération Clos de l’Aumône, qui est en cours de négociation avec l’opérateur Negocim depuis 2002, ou à Checy avec l’opération de l’Ormeteau.
[22] Desjardins X, Leroux B. (2007). Les Schémas de cohérence territoriale : des recettes du développement durable au bricolage territorial, Flux, n° 69, p. 6-20.
[23] Op. cit.
[24] Latour B. (1999). Morale et technique : la fin des moyens, Réseaux, n° 100, p. 39-58.
[25] Par exemple, pour la brique « Pôle d’échange multimodal de la Blancarde », les briques « Prolongement du Métro Timone-Blancarde » et « Tramway Joliette-St Pierre » doivent être préalablement réalisées.
[26] Le directeur adjoint à la direction des Transports, Ville de Marseille, première réunion du GTT « Interactions Déplacements / urbanisation ».
[27] Deuxième réunion du GTT « Priorités d’investissement », direction des Transports et des Déplacements, le 5 mai 1999.
[28] Entretien avec le chef de projet de l’Agenda 21, le 24 juillet 2014.
[29] Par exemple, pour le pilier 1 « Pour une ville plus conviviale, solidaire, éducatrice », les objectifs déclinés sont : dynamiser et multiplier les espaces communs de rencontre et créer de nouveaux usages (1), mettre en valeur les richesses sociale, culturelle et intergénérationnelle de la Ville et de ses habitants (2), etc.
[30] Entretien avec le chef de projet de l’Agenda 21, le 24 juillet 2014.
[31] Idem.
[32] Appel à projets de la Région PACA, auquel la Ville a répondu et a été lauréate. Ce programme est également piloté par le chef de projet Agenda 21.
[33] Entretien avec la directrice du PRU, le 27 mai 2015.
[34] Idem.
[35] Entretien avec le chef de projet de l’Agenda 21, Vitrolles, le 24 juillet 2014.
[36] Idem.